LE JUGEMENT DIFFÉRÉ
LE JUGEMENT DIFFÉRÉ :
LA MISÉRICORDE À L’ÉPREUVE DU TEMPS
Mardi 24 juin 2025
Semaine 13 : La fin en images
Thème
général : Allusions, images
et symboles : Méthodes d’étude de la prophétie biblique.
Texte à méditer : “
Quand Dieu vit qu’ils agissaient ainsi
et qu’ils abandonnaient leur mauvaise conduite, il renonça au châtiment dont il
les avait menacés ” (Jonas 3:10 - BFC).
I. NINIVE SOUS
MENACE : QUAND LA REPENTANCE SUSPEND LE JUGEMENT
« Jonas entra dans la ville et
commença par y marcher toute une journée en proclamant : Encore
quarante jours, et Ninive est détruite ! » (Jonas 3:4). Le
message est brutal, sans nuance.
Il semble que la ville soit
irrémédiablement condamnée. Et pourtant, ce compte à rebours n’annonce pas une fatalité, mais une opportunité. « Le Seigneur ne tarde pas dans
l’accomplissement de la promesse... mais Il use de patience, ne voulant pas qu’aucun périsse » (2 Pierre
3:9). Ce délai de quarante jours révèle moins un changement divin qu’une
pédagogie céleste : le temps donné est un espace de
grâce.
Le nom même de Ninive (« grand
poisson dans la ville ») semble prophétique : Dieu, déçu par l’infidélité
d’Israël, envoie Son prophète dans une ville païenne pour y chercher une
réponse que Son peuple n’offre plus. Il convient également de souligner que la ville de
Ninive fut visitée une seconde fois, environ cent cinquante ans plus tard (vers
630 av. J.-C.), par le prophète Nahum, porteur cette fois d’un oracle de
condamnation en raison de la persistance de la méchanceté de ses habitants. Le jugement différé n’était pas aboli, seulement
suspendu. Cette
double intervention illustre avec clarté la manière dont Dieu agit, tant envers
Son peuple qu’envers les nations : Il offre d’abord Sa grâce aux
pécheurs, mais exerce ensuite Sa justice à l’égard
de ceux qui refusent de se détourner de leurs mauvaises voies.
II. UNE
REPENTANCE FRAGILE : QUAND L’OUBLI EFFACE LA CRAINTE DE DIEU
« Les gens de Ninive crurent en
Dieu » (Jonas 3:5). Le jeûne fut proclamé, la prière s’éleva, et la ville fut
épargnée.
Jonas, lui, espérait un jugement
spectaculaire. Il voulait des feux d’artifice. Il voulait que le feu
tombe du ciel pour valider son message. Mais
le changement de cœur du peuple ne l’émut pas. Son orgueil de prophète blessé
révélait une
théologie déficiente : il croyait que la prédication devait produire des
événements visibles, et non des conversions invisibles. Sommes-nous aujourd’hui aussi aveugles que
Jonas ? N’avons-nous pas fait de l’accomplissement prophétique notre obsession,
aux dépens de la transformation du cœur ?
Plus
encore, Jonas ne voyait pas les Ninivites comme Dieu les voyait. Comme nous, il
croisait des êtres au langage, à la culture et au comportement différents, et
les jugeait indignes de compassion. Mais Dieu regarde autrement : « L’homme regarde à ce qui frappe les yeux,
mais l’Éternel regarde au cœur »
(1 Samuel 16:7). La repentance véritable commence quand nous cessons de voir
les autres comme des obstacles ou des menaces, pour les considérer comme des
êtres créés à l’image de Dieu. La repentance ne peut être un simple réflexe de
peur : elle doit transformer le cœur. Jonas, qui annonçait la repentance aux
autres, devait en vérité en faire lui-même l’expérience.
III. DE NINIVE À
BABYLONE : UN APPEL RÉPÉTÉ DANS L’HISTOIRE PROPHÉTIQUE
Dieu répète Son schéma ; hier
avec Ninive, aujourd’hui avec Babylone : Avertir avant de juger. « Craignez
Dieu, … car l’heure de son jugement est venue… » (Apo. 14 :7). Comme Ninive, Babylone reçoit un
avertissement clair - « Sortez du milieu
d’elle, mon peuple… » (Apocalypse 18:4), avant que le jugement
ne tombe. « Fuyez de Babylone, et que chacun sauve sa vie, De peur que vous
ne périssiez dans sa ruine! Car c'est un temps de vengeance pour l'Éternel ; Il
va lui rendre selon ses œuvres » (Jérémie 51:6).
L’appel lancé à Ninive résonne à la fin des
temps. Il s’adresse cette fois à ceux qui vivent dans Babylone – non plus la
cité païenne d’autrefois, mais le système spirituel corrompu des derniers
jours. Babylone, dans l’Apocalypse, n’est pas une ville terrestre mais un système politico-religieux universel opposé à Dieu (Apocalypse 17:5). Ce double visage de
Babylone – historique et eschatologique – reflète la constance de Dieu dans Sa
méthode : Il
avertit avant de juger. Comme
à Ninive, Dieu appelle. Et comme à Ninive, certains entendent.
Ce cri prophétique n’est pas
réservé à une élite religieuse. Dieu
utilise qui Il veut. L’histoire le
montre : Jonas, messager réticent, fut pourtant l’instrument d’un réveil
massif. De la même manière, aujourd’hui encore, ceux que nous considérons comme
des
étrangers ou des "figures marginales" peuvent entendre et répondre à
l’appel divin plus promptement que ceux qui portent le nom de Son peuple. «
Les hommes de Ninive se lèveront au jour du jugement… et ils condamneront cette
génération » (Matthieu 12:41).
IV. PROPHÉTIES
CONDITIONNELLES OU ABSOLUES : APPRENDRE À DISCERNER LES TEMPS
Ce qui est frappant dans le livre
de Jonas, c’est que la prophétie ne s’accomplit pas – du moins, pas
immédiatement. Parce qu’elle
était conditionnelle : « Si cette nation contre laquelle j’ai parlé se détourne
de sa méchanceté, je me repentirai du mal que je pensais lui faire » (Jérémie
18:8).
Toutes les prophéties ne
relèvent pas du même régime spirituel. Certaines sont conditionnelles
: elles dépendent de la réponse
humaine. C’est le cas, par exemple, du message de Jonas à Ninive ou des
avertissements de Jérémie concernant Juda. Ces prophéties ont une portée locale
ou relationnelle ; elles
s’inscrivent dans le cadre de l’alliance entre Dieu et Son peuple. Dieu y dit
en substance : « Si vous changez de voie, Je changerai le cours du jugement.
»
D’autres prophéties, en
revanche, sont absolues. Elles ne reposent pas sur la réaction de
l’homme, mais sur un décret divin irrévocable. C’est le cas des grandes annonces
eschatologiques : la venue glorieuse du Christ (Apocalypse 19:11),
l’établissement du Royaume (Daniel 2), les jugements d’Apocalypse, la victoire de l’Agneau, la fin du
mal. Ces prophéties ont une portée universelle, et s’accompliront quoi qu’il arrive, car elles
sont liées non plus à une alliance conditionnelle, mais à l’aboutissement
du salut voulu par Dieu
depuis l’éternité.
En résumé : ce que Dieu promet
dans le cadre de Son alliance peut être suspendu ou infléchi selon la fidélité
du peuple. Mais ce qu’Il a décrété pour l’accomplissement final de Son dessein
de grâce s’accomplira inéluctablement.
|
Critère |
Prophéties conditionnelles |
Prophéties absolues |
|
Portée |
Locale / relationnelle |
Universelle / eschatologique |
|
Exemples |
Jonas 3 ; Jérémie 18 |
Apocalypse 19:11 ; Daniel 2 |
|
Condition |
Réponse humaine |
Décret divin |
|
Clé théologique |
Alliance Dieu–peuple |
Réalisation du salut final |
Même une proclamation imparfaite peut produire
un retournement : Jonas n’a prêché qu’une journée, sans grâce
ni appel. Mais l’Esprit était à l’œuvre. Certains ont peut-être obéi par peur,
d’autres par suivisme. Mais un seul cœur sincère a suffi pour que Dieu se
détourne du mal. « Je cherche un homme qui élève un mur et qui se tienne à
la brèche… » (Ézéchiel 22:30).
V. SE PRÉPARER
AUJOURD’HUI POUR RÉSISTER DEMAIN : L’ADORATION COMME FRACTURE FINALE
À la fin des temps, un dernier message est proclamé par trois anges : « Craignez Dieu, et donnez-lui gloire… » (Apocalypse 14:7). Ces anges sont-ils littéraux ? Sont-ils symboliques ? Dans le langage biblique, ces ‘anges’ représentent à la fois des messagers célestes et l’Église fidèle mandatée pour avertir le monde. Paul lui-même fut reçu “comme un ange de Dieu” (Galates 4:14). Le mot grec angelos signifie “messager” : il peut désigner un pasteur, un prophète, un témoin.
Rien n’exclut non plus que des anges célestes participent à cette proclamation
(Apocalypse 14:6). Dieu unit les voix visibles et invisibles pour faire
retentir Son dernier appel. Peu importe : nous sommes ces
messagers imparfaits, porteurs
de la bonne nouvelle éternelle. Comme Jonas, nous hésitons parfois, nous
reculons, nous espérons que la prédication confirmera nos convictions plutôt
qu’elle ne sauvera des âmes.
Mais Dieu qualifie ceux qu’Il appelle. Le message des trois anges n’est pas réservé
aux parfaits, mais confié à des hommes comme Jonas - faibles, orgueilleux,
résistants, mais disponibles. Ce qui compte, c’est de porter l’appel, et de le
porter haut. Car à la fin, la fracture ultime n’est pas culturelle ni doctrinale,
mais spirituelle : adorer le Créateur ou adorer
l’image de la bête (Apocalypse 14:9). Et cette adoration ne se décide pas
dans la crise, mais dans l’habitude. « La fidélité des saints… ce sont ceux
qui gardent les commandements de Dieu et la foi de Jésus » (Apocalypse
14:12). Ce n’est pas une posture de crise, mais la cristallisation d’habitudes
spirituelles.
Conclusion :
Une grâce offerte, un jugement suspendu, un choix à faire
Le livre de Jonas nous enseigne un
principe prophétique et spirituel : le
jugement est réel, mais différé. Il
attend la réponse. Et la réponse attend un cœur disponible. L’histoire de
Ninive est celle d’une génération perdue qui fut sauvée… pour un temps. Elle
est aussi celle d’un prophète orgueilleux qui fut corrigé… sans qu’on sache
s’il se convertit vraiment. Dieu appelle encore, et avertit encore. Le compte à
rebours continue. Puisse notre vie quotidienne nous préparer à être un
Ninivite repentant - et non pas un résistant de Babylone.
Bonne journée sous l’œil bienveillant de
l’Éternel !
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